Mieux connaître les règles du jeu bancaire pour reprendre le contrôle de son argent

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En Tunisie, la relation entre les citoyens et leur banque reste souvent floue, parfois tendue. Manque de transparence ? Pas vraiment. Le problème est plus profond : beaucoup de clients ne comprennent tout simplement pas les règles du jeu. Pourtant, une meilleure culture financière pourrait tout changer.

“J’ai été prélevé, mais je ne sais pas pourquoi.”
“On m’a refusé un prêt, sans explication.”
“Je préfère garder mon argent chez moi, je me méfie des banques.”

Ces phrases, vous les avez sûrement déjà entendues. Elles illustrent une réalité tunisienne : des millions de personnes sont bancarisées, mais la culture financière fait souvent défaut. Or, comprendre le fonctionnement de sa banque n’est pas un luxe, c’est une condition essentielle pour gérer son argent avec sérénité, éviter les erreurs et construire une relation de confiance avec son conseiller.

Une incompréhension qui coûte cher

Prenons un exemple simple : la carte bancaire. Beaucoup de Tunisiens l’utilisent sans connaître ses limites, ses coûts ou même les protections qu’elle offre. Il en va de même pour les crédits : peu de clients comprennent réellement ce que signifient des termes comme « taux d’intérêt », « coût total » ou « pénalités de retard ». Résultat : incompréhensions, méfiance, voire situations de surendettement.

Le problème ne réside pas uniquement dans le manque d’information, mais plutôt dans le manque d’accès à une information claire, simple et compréhensible. Trop souvent, les banques s’expriment dans un langage technique qui éloigne le client. Celui-ci décroche… ou se tourne vers des solutions informelles, parfois risquées.

Autre défi majeur : la digitalisation : Paiement mobile, application bancaire, carte virtuelle… Ces outils sont pratiques, mais restent encore mal compris ou peu utilisés. Par crainte de se tromper ou en l’absence d’un accompagnement adapté, nombreux sont ceux qui continuent à utiliser uniquement le cash dans leur quotidien.

Mieux informé, mieux accompagné

Une bonne culture financière ne transforme pas un client en expert. Mais elle lui permet de faire des choix éclairés, de poser les bonnes questions, de savoir ce qu’il signe – et surtout, d’éviter les pièges.

Un client bien informé :

  • Choisit un crédit adapté à sa situation,
  • Sait clôturer un compte proprement,
  • Comprend les frais bancaires,
  • Gère mieux son budget au quotidien.

C’est aussi un client plus confiant, plus autonome, plus fidèle. La banque, elle aussi, y gagne : moins de litiges, une meilleure relation, et une utilisation plus pertinente de ses produits.

Et en Tunisie, on en est où ?

Une prise de conscience est en train de s’opérer. La Banque Centrale, à travers son Observatoire d’Inclusion Financière, met à disposition du grand public des contenus pédagogiques en ligne : comment bien utiliser sa carte, comment régler un litige, ou encore comment éviter les découverts à répétition.

Certaines campagnes, comme celle menée pour la plateforme “TuniChèque”, ont permis de sensibiliser les citoyens à l’utilisation des chèques. Par ailleurs, de plus en plus de banques forment leurs conseillers afin qu’ils jouent également un rôle d’éducateurs financiers : ils informent, conseillent et préviennent les risques liés à une mauvaise gestion.

Mais ces initiatives restent encore insuffisantes. Pour aller plus loin, il faudrait :

  • Des vidéos explicatives simples sur les réseaux sociaux,
  • Des brochures accessibles en dialecte tunisien,
  • Des tutoriels mobiles pour accompagner les usagers pas à pas,
  • Des ateliers de proximité, dans les quartiers, pour répondre aux vraies questions.

Ce que cela change, concrètement

Former ses clients, pour une banque, ce n’est pas une charge. C’est un investissement. Cela permet de construire une relation durable, responsable et humaine.

Et pour le pays, les retombées sont tout aussi positives : plus d’inclusion financière, moins de cash informel, davantage d’épargne, donc plus de financement pour l’économie.

Bref, la culture financière n’est pas un luxe. C’est une nécessité.

Neyer Memmi  – Consultant-Formateur secteur bancaire

note

Culture financière et relation bancaire

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